Prendre du temps... pour lire! -9




Un livre, qu'il soit roman, essai, recueil de poésie, biographie, est objet à manipuler, à regarder, à feuilleter avant d'être lu. J'aime toujours toucher à la tranche,  passer les doigts sur le papier parfois rêche, parfois soyeux. Que dire de l'odeur des livres?  Parfum d'encre, de papier, émanations qui changent avec l'âge du livre...Avez-vous envie de sentir ce bouquin que vous vous apprêtez à lire?  Comme quand j'étais enfant, j'aime  plonger dans l'image de couverture: est-ce que je pourrais y trouver des indices révélant ce que cache le livre? La jaquette et le bandeau annonce "Best-seller", "Prix Goncourt", " Prix du lecteur de..." : déjà l'imaginaire s'active...décodant dans ces quelques mots des informations qui  attirent ou qui font reculer, selon l'humeur du moment. 
Le livre est un objet sensuel: il sollicite nos sens du toucher, de la vue, de l'odorat...On l'aime: on le conserve, on le range dans un rayon de bibliothèque: entassé parmi d'autres du même auteur ou du même genre, bien tenu entre des appui-livres ou empilé pêle-mêle avec ses semblables. On ne l'aime pas: on le conserve...pour le prêter, pour garnir la bibliothèque ou parce qu'on ne peut se débarrasser simplement d'un tel objet; on le prête, on le donne, on le confie à une boite à livres ou ...

Mais qu'en est-il d'un ebook? Objet virtuel, sans odeur, sans parfum, qui ne suscite pas de réactions tactiles. Il n'a conservé de son ancêtre que l'aspect ou la vertu de recueillir les mots, les idées et les transmettre. Fini l'objet qu'on accumule, que l'on regarde, feuillette. On lit de la première à la dernière page: et c'en est fini de sa vie. On passe au suivant. Ils sont faciles à transporter: une petite bibliothèque peut se retrouver discrètement entreposée dans une liseuse ou sur une tablette .Que d'espace économisé, combien d'arbres sauvegarder? 
Et pourtant... je dois l'avouer je demeure amoureuse du livre papier...

Ces deux livres dont je vous parlerai dans cet article, sont des livres électroniques.Ils m'ont accompagnée en voyage dernièrement. Ils ont réussi à captiver toute mon attention: en fait les contenus substantiels de ces deux romans ont  atteint leur objectif de me plonger dans des univers intriguants. Mais une fois terminés, ils sont hors de ma vue...je ne peux les toucher, les prêter, les montrer...mais je peux toujours en parler!


Le premier, dont le titre, "Le livre des choses cachées" de Francesco Dimitri, évoque déjà  tout un monde de possibles: qu'est-ce qu'un livre des choses cachées? Qu'est-ce qui est cachée? De qui? Pourquoi?
Laissez-moi vous guider, un tout petit peu! Le roman s'amorce sur une rencontre annuelle entre 4 amis d'enfance, une rencontre dans le village où ils ont grandi, dans le talon de l'Italie comme il est dit dans le roman, dans les Pouilles. Ces quatre amis, Fabio, Tonio, Art et Mauro se doivent d'être au rendez-vous pour célébrer le Pacte. L'absence de l'un, l'instigateur de ces retrouvailles, mystifie les 3 autres: Art ne se présente pas, on ne le trouve pas. Il a disparu semble-t-il, encore une fois, comme 22 ans plus tôt. Chacun selon sa perspective aborde tour à tour l'histoire de leurs enfances et de leurs vies actuelles, cherchant à donner un sens aux événements qu'ils vivent maintenant. La disparition de Art, des hypothèses farfelues et  improbables qui se tissent pour expliquer son absence , la  présence de la Sacra Corona Unita mafia locale: tous les ingrédients sont là pour nous laisser croire à un thriller, un roman policier comme bien d'autres. Seulement ce serait sans compter sur l'atmosphère de magie qui semble régner,  sur l'étrangeté des événements: on serait dans un roman fantastique alors?  Peut-être, si on oublie les personnages, les liens entre eux, la force ou la faiblesse de leur caractère, les amours troubles ou cachés, les familles omniprésentes en trame de fond. Alors voilà, c'est un drame de mœurs? Oui...et non. C'est un peu tout ça! On y est à la conquête des choses cachées: celles qu'on voudrait voir, connaître et éviter tout à la fois. Les non-dits, les absences, les regards détournés, les désirs, les rêves, le rêve...On y est au bout de la terre, on sent le sirocco qui s'infiltre, la chaleur et la terre déséchée...Une quête des choses cachées, un retour à l'enfance et l'adolescence où tout est possible...et un regard amer sur la vie adulte où l'espace des possibles se rétrécie comme peau de chagrin.

Francesco Dimitri est un jeune écrivain italien né en 1981, auteur de romans fantastiques, de thrillers et d'essais. Il a reçu le Prix Douglas Kennedy pour  "Le livre des choses cachés". Si on retrouve peu d'informations à son sujet, Pierre Lemaitre, auteur du second roman que je vous propose est certes davantage connu. Né en 1951, cet auteur et scénariste français a reçu en 2013 le Prix Goncourt pour son roman "Au revoir là-haut"; en 2018 il publie  "Couleur d'incendie"  le second roman de la trilogie qui s'achève avec "Miroir de nos peines" publié en janvier 2020.  Nul besoin d'avoir lu les premiers volumes de la trilogie pour s'aventurer dans ce dernier: des personnages reviennent, à une autre époque de leur vie. De la fin de la Première Guerre mondiale avec "Au revoir la haut", on passe aux années 20 et 30 dans "Couleur d'incendie".



La vie a poursuivi son cours quand "Miroir de nos peines" s'amorce pendant la Seconde Guerre mondiale au moment de la prise imminente de Paris et de l'exode des Parisiens fuyant l'envahisseur allemand.  On y retrouve Louise qui avait 10 ans dans "Au revoir là-haut"; elle a maintenant 30 ans, en deuil de sa mère, enseignante, elle travaille aussi au restaurant voisin. Un vieux client y revient tous les samedis, ce client qui lui fera une demande très particulière à laquelle elle consentira..ce qui changera le cours tranquille de sa vie. Ici, comme dans "Le livre des choses cachées", on aperçoit l'histoire sous le regard de chacun des protagonistes qui nous font vivre les tourments de cette période de chaos où tout est bousculé: les secrets de famille, les secrets les plus sombres sont mis à jour, l'humanité des uns se confrontent à la cruauté des autres, les rêves se font et se défont.    Des personnages bien construits (M. Lemaître a été formé en psychologie...), des faits historiques bien campés,  des péripéties et des personnages qui se croisent ou que l'on souhaite voir se croiser,  des mystifications: le lecteur est tenu en haleine tout au long de cet imposant roman (plus de 500 pages...ce que l'on ne voit pas quand on lit un ebook!), captivé par l'histoire mais aussi par le ton, la verve de Pierre Lemaître.

Lequel préférerez-vous? 


Bonne lecture!





Commentaires

  1. Je préfère le papier, sans contredit, Johanne! J'ai toujours un livre ou un magazine sous la main prêts à être lu, à être feuilleté. Je ne pourrais pas m'en passer. J'adore aller à la bibliothèque, traîner dans les allées à la recherche du p'tit trésor.

    Pour ce qui est du eBook, je l'apprécie en voyage.

    Merci du partage!

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    1. C'est vrai qu'il est bien pratique en voyage le ebook! Sinon, vive le livre papier, les magazines papier!

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